Sans principes et sans gêne
Lundi, les Canadiens cherchaient à comprendre pourquoi Eve Adams avait été accueillie à bras ouverts au sein du caucus libéral. Ce qui pouvait sembler être un bon coup à première vue – recruter un membre du Parti conservateur au pouvoir – ressemble davantage à un acte désespéré quand on y regarde de plus près.
Adams avait récemment appris qu’elle avait atteint une impasse au sein du Parti conservateur, et elle se voyait contrainte de quitter la politique fédérale lorsqu’elle s’est soudain rendu compte qu’elle était libérale après avoir fait partie du Parti conservateur depuis l’âge de 14 ans. Le facteur qui avait précipité sa défection, disait-on, était son désaccord avec une plateforme de parti sur laquelle elle s’était fait élire sans scrupule en 2011 – à savoir le fractionnement du revenu. Son intention était plus probablement de couvrir ses arrières afin de pouvoir soit rester députée ou bénéficier de meilleurs avantages si elle perd l’élection.
Sachez que si elle se présente et perd à la prochaine élection, Adams touchera six mois additionnels au titre de l’indemnité de départ auxquels elle ne serait pas admissible si elle ne se présente pas du tout. Étant donné que le Parti conservateur lui avait interdit d’être candidate dans une course à l’investiture cette année en raison d’écarts de conduite, il semble trop commode qu’elle s’aperçoive soudain qu’elle est libérale après tout. En plus des manigances liées à l’investiture, le bilan d’Adams comme députée est entaché d’actes égocentriques.
Alors qu’elle était la secrétaire parlementaire du ministre des Anciens Combattants, elle a boudé les cérémonies du jour du Souvenir pour courir les magasins de New York pendant une semaine. Elle a également été critiquée dans les médias pour avoir bloqué les pompes à essence d’une station-service d’Ottawa en exigeant un remboursement de six dollars pour un lavage d’auto. Sans compter que les conservateurs lui ont interdit de se présenter après qu’elle eut agressé verbalement les membres du conseil de la nouvelle association d’Oakville—North-Burlington pendant une réunion (alors qu’elle n’était pas membre du conseil), puis refusé de partir.
Compte tenu de tout cela, demandez-vous pourquoi Justin Trudeau voudrait qu’elle fasse partie de son caucus ou qu’elle porte les couleurs libérales dans l’élection qui approche à grands pas. Dans ce cas-ci, l’idée des photos de presse l’a emporté sur tout raisonnement. À part cela, il s’agit d’une nouvelle trahison de la promesse de tenir des courses ouvertes à l’investiture des candidats du parti. Il paraît qu’Adams sera parachutée dans la circonscription torontoise d’Eglington—Lawrence pour s’opposer au ministre des Finances Joe Oliver. Jusqu’à présent, depuis la promesse de courses ouvertes, le parti a bafoué le processus dans Toronto-Centre, Trinity—Spadina, Ottawa—Orléans et Vancouver-Sud, tout en bloquant des candidats aspirants comme Jody Emery (la femme du soi-disant « prince de la mari », Mark Emery). Il semblerait que la politique ne tienne que lorsque cela fait l’affaire des dirigeants du parti.
Le problème n’est pas non plus la nomination de candidats. C’est le fait de tenir des conférences de presse à grand retentissement pour faire les manchettes de l’heure – comme dans le cas de la défection d’Adams – puis de tout oublier quand l’opportunisme l’exige. Quand on se donne une politique, on l’applique. Le parti essaie de faire semblant en espérant que personne ne s’en aperçoive. Sans doute comme il espère que personne ne s’apercevra de qui est vraiment Eve Adams. C’est bien beau en apparence, mais dès qu’on gratte un peu…