“Les Canadiens les plus fortunés se portent mieux que jamais” dit Hughes
On porte beaucoup d’attention aux salaires et primes des PDG les plus riches du Canada, car ils sont tellement hors de toute proportion avec la paie nette de la plupart des gens que c’en est toujours saisissant. Selon une récente étude du Centre canadien de politiques alternatives (CCPA), la répartition de la richesse au Canada accentue le problème des inégalités. Le rapport intitulé « Outrageous Fortune » examine la richesse énorme qui est concentrée entre les mains des 86 résidants les plus riches du Canada et propose des pistes de solution pour ralentir l’accumulation de ressources par ces richissimes Canadiens.
Le CCPA met l’accent sur la richesse par opposition aux salaires parce qu’elle est plus révélatrice de l’iniquité et repose sur des facteurs plus nombreux que les salaires seuls. En incluant les biens immobiliers et les dettes dans le calcul, nous constatons que les 86 Canadiens les plus riches possèdent autant de richesses que les 11,4 millions de Canadiens les plus démunis pris ensemble. En pourcentages de notre population, 86 personnes correspondent à 0.0002 % et 11,4 millions à environ 34 %. Ces chiffres sont frappants, mais il importe de noter que l’écart grandit aussi. En effet, en 1999, la richesse des 86 plus fortunés correspondait à celle des 10,1 millions de plus pauvres réunis.
Il est déjà assez difficile d’imaginer qu’un chef d’entreprise qui gagne 20 millions de dollars en salaire et en primes travaille 415 fois plus fort qu’une personne qui touche le salaire moyen au Canada, soit 48 250 $. Il est carrément impossible de concevoir comment 86 personnes méritent de contrôler autant de richesses qu’un bon tiers de la population. Le rapport du CCPA indique toute l’étendue de la richesse de ces 86 personnes : elles pourraient acheter la province du Nouveau-Brunswick tout entière (maisons, hypothèques, dettes, économies, biens comme les voitures, voire l’ensemble des fonds de pension) sans épuiser leurs ressources.
Voici un dernier fait important tiré du rapport « Outrageous Fortune » : peu importe l’acharnement avec lequel une personne travaille, jamais elle ne rejoindra les rangs des plus riches au Canada. Même si certaines des personnes dont le nom figure sur la liste travaillent comme dirigeants d’une entreprise (familiale), la majeure partie de leur fortune leur a été léguée. Seules les circonstances leur ont permis d’atteindre des situations aussi privilégiées. Cela n’explique toutefois pas pourquoi cette richesse augmente plus vite que celle de tous les autres Canadiens. Il existe clairement des facteurs systémiques qui pourraient expliquer en partie ce phénomène.
Parmi ces facteurs, un des principaux est le taux d’imposition des gains en capital, qui n’équivaut qu’à environ la moitié du taux d’imposition du revenu. Le CCPA explique qu’un Canadien gagne 100 000 $ par année en vendant une entreprise, tandis qu’un autre gagne 100 000 $ grâce à un emploi, mais que le travailleur devra payer deux fois plus d’impôt que le propriétaire qui vend une entreprise. Une autre solution que propose le CCPA est la hausse du taux d’imposition des plus hauts revenus au Canada. On ne cesse de nous répéter que ces mesures freineraient la création d’emplois, mais après 30 années passées à attendre les effets de retombée, il est passablement clair qu’il s’agit de vœux pieux de la part de gens qui s’en mettent plein les poches.