Le remaniement ministériel ne change pas grand chose
Le remaniement ministériel de cette semaine n’a consisté en fait qu’à déplacer les fauteuils sur le pont du Titanic : il n’a pas résolu les questions urgentes avec lesquelles le Canada est aux prises. Cet exercice de relations publiques a tout simplement permis au gouvernement de nommer au sein de son cabinet « gonflé » des personnes qui servent les intérêts du Parti conservateur.
Ce dont ce pays a besoin dès maintenant, c’est de retrouver les emplois perdus en raison de la récession, qui continue. Il semble toutefois que les seuls bons emplois que nous créons sont destinés aux personnes comme Julian Fantino ou Peter Kent. Plutôt que de se pencher sur les suppressions d’emplois à temps plein, l’insuffisance des prestations de retraite ou l’augmentation de la pauvreté chez les aînés, le gouvernement a décidé de se concentrer sur les besoins du secteur financier en abaissant l’impôt des sociétés, ce qui sert ses intérêts politiques immédiats.
Ce n’est pas un secret que les conservateurs devront mieux jouer leurs cartes à Toronto s’ils veulent devenir majoritaires. Il était donc politiquement rentable pour eux de promouvoir M. Kent et M. Fantino, des députés de la région de Toronto. Mais était-ce nécessaire?
Peter Kent est le cinquième ministre nommé à l’Environnement en cinq ans. C’est un poste ingrat qui brûle les ministres, tenus d’expliquer pourquoi le Canada s’est retrouvé en queue de peloton des pays industrialisés en ce qui concerne la protection de l’environnement. Avec les sables bitumineux qui sont développés à un rythme furieux, les engagements que nous avons pris dans le passé en matière de changements climatiques semblent bien absurdes. Il est évident que ce gouvernement n’accorde pas une grande priorité à l’environnement. D’une part, nous recevons des prix Fossiles lors des conférences internationales sur les changements climatiques et, d’autre part, des lobbyistes travaillant pour les sociétés pétrolières ont un accès privilégié au premier ministre et à sa garde rapprochée. La nomination de M. Kent ne changera sans doute rien à la situation.
Le poste de M. Fantino, ministre d’État aux aînés, est tout aussi ingrat. L’indifférence des conservateurs à l’égard des aînés est telle que de plus en plus de retraités doivent chercher de nouvelles sources de revenu en retournant travailler, en se contentant de moins, ou même en fréquentant des banques alimentaires pour arriver à joindre les deux bouts. L’augmentation minime du RPC n’a pas compensé la hausse de l’inflation et la flambée des prix de biens de première nécessité comme l’énergie et la nourriture. Les aînés canadiens peuvent maintenant s’attendre à ce que M. Fantino les ignore, lui qui n’a daigné se présenter à aucun débat réunissant tous les candidats lors de sa récente campagne électorale.
Avec l’ajout de Ted Menzies et la réaffectation de Diane Ablonczy, le cabinet de M. Harper compte maintenant 38 personnes. Ce n’est pas signe d’austérité économique, bien au contraire. Une poignée de ministres détiennent le pouvoir, et bon nombre de ceux nouvellement nommés ne sont là que pour jeter de la poudre aux yeux en vue des prochaines élections fédérales. Ils font tout simplement de la figuration pour que certaines régions soient représentées au cabinet, ce qui pourrait permettre aux conservateurs de gagner des sièges dans l’Ouest et dans la grande région de Toronto.
Si le gouvernement Harper entend dire aux Canadiens qu’ils doivent se serrer la ceinture – principalement pour compenser le manque à gagner résultant des réductions d’impôt consenties aux sociétés, soit des milliards de dollars – il devrait faire preuve de leadership et commencer par serrer sa propre ceinture.